par David de Pariente, associé.
Depuis l’adoption de la Loi n°1.528 du 7 juillet 2022, les « investisseurs numériques » peuvent désormais s’appuyer sur un cadre législatif dynamique et plus précis à Monaco.
Cette Loi, technique, s’inscrit dans la lignée des textes européens adoptés récemment en reprenant et prévoyant un certain nombre de définitions indispensables à sa compréhension.
A titre d’exemple, la Loi n°1.528 définit :
- Le métavers comme « une plateforme persistante et synchrone créant un ou des univers virtuels immersifs proposant des produits et services en ligne à plusieurs utilisateurs simultanément sous forme d’avatars, pouvant s’y déplacer, y interagir socialement et économiquement ». A ce sujet, notons que le texte prévoit que toute fourniture ou exploitation d’un métavers représentant un élément du patrimoine national de la Principauté devra nécessairement être subordonnée à l’obtention d’une autorisation préalable du Ministère d’Etat.
- Les cryptoactifs comme des jetons financiers (assimilables à des instruments financiers) ou des actifs numériques (actifs financiers virtuels, jetons d’usage, et jetons non fongibles communément dénommés NFTs).
Sans prétendre à l’exhaustivité, la Loi n°1.528 instaure une série de dispositions encadrant les activités de prestations de services sur cryptoactifs (I). Elle apporte également des précisions sur les opérations d’ICO dont le régime juridique avait déjà été précisé par le biais de la Loi n°1.491 du 23 juin 2020 et son Ordonnance souveraine d’application n°8.258 (II).
I. Des conditions relatives aux prestations de services sur cryptoactifs
La Loi n°1.528 opère une distinction entre les prestations de services sur cryptoactifs qui sont nécessairement soumises à un agrément préalable du Ministère d’Etat, et les prestations de services sur cryptoactifs soumises à un agrément de la Commission de Contrôle des Activités Financières (CCAF).
Un agrément préalable obligatoire pour diverses prestations de services sur cryptoactifs
Un agrément préalable du Ministère d’Etat répondant à certaines conditions d’obtention est nécessaire pour les activités suivantes :
• Emission de cryptoactifs ;
• Conservation ou administration de cryptoactifs ou d’accès à des cryptoactifs ;
• Exploitation d’une plateforme d’affichage d’intérêts acheteurs et vendeurs de cryptoactifs ;
• L’échange d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques, ou contre de la monnaie ayant cours légal ;
• L’exploitation d’une plateforme de négociation d’actifs numériques.
Ledit agrément sera délivré seulement sous certaines conditions (i.e. immatriculation à Monaco, honorabilité et compétence des dirigeants de la société de prestations de service, mise en place d’une procédure de gel LCB/FT répondant aux critères du Service d’Information et de contrôle sur les circuits financiers monégasques, etc.).
Un agrément préalable de la CCAF pour certaines prestations de services sur cryptoactifs
L’obtention d’un agrément préalable délivré par la Commission de contrôle des activités financières, dans les conditions prévues par la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007 sur les activités financières, est requis pour les activités suivantes :
• Placement de cryptoactifs ;
• Exécution d’ordres sur cryptoactifs ;
• Réception-transmission d’ordres sur cryptoactifs ;
• Conseil en cryptoactifs.
Une dispense d’agrément préalable est prévue au bénéfice des prestataires de services financiers disposant déjà d’un agrément de la CCAF pour exercer une activité financière de même catégorie en Principauté, sous réserve toutefois d’une information préalable du régulateur.
II. Des précisions relatives aux opérations d’ICO en Principauté
Pour rappel, une ICO (Initial Coin Offering) est définie comme une « Offre de jetons consistant en une proposition de souscrire à ces jetons quelle qu’en soit la forme » (cf. Loi n°1.491 du 23 juin 2020 et Ordonnance souveraine d’application n°8.258). Ces opérations de levées de fonds réservées aux sociétés immatriculées à Monaco ou en cours de formation à Monaco sont subordonnées à l’obtention d’une autorisation administrative préalable délivrée par le Ministère d’Etat, qu’elles soient publiques ou privées.
Le caractère privé des ICOs portant sur des jetons est conditionné à au moins l’un des critères suivants :
• Offre destinée uniquement à des investisseurs qualifiés ;
• Offre destinée à moins de 150 investisseurs non-qualifiés ;
• Offre destinée à des investisseurs qui acquièrent des jetons pour un montant total d’au moins 100.000 euros ;
• Offre proposant des jetons d’une valeur nominale unitaire d’au moins 100.000 euros.
Notons que lorsque l’autorisation préalable concerne un jeton dont la valeur nominale unitaire s’élève à au moins 100.000 euros, l’autorisation prend la forme d’un label délivré après examen :
• d’informations relatives à l’émetteur et les porteurs de projets ;
• d’une note de synthèse ;
• d’un « white paper » (document d’information destiné aux investisseurs) ;
• des modalités de placement des fonds de l’investisseur sous séquestre.
La Loi n°1.528 vient préciser que l’offre de jetons ne peut pas porter sur des jetons non fongibles et que, lorsqu’elle est faite au public, l’offre ne peut pas porter sur des jetons financiers. Par ailleurs, le texte précise que l’émetteur est tenu de déterminer la nature du jeton et ses droits afférents, le caractère public ou privé de l’émission, ou la valeur nominale unitaire du jeton.
L’expertise de Gordon S. Blair en matière de Cryptoactifs
Gordon S. Blair Law Offices (Monaco) assiste de nombreux acteurs dans le domaine des cryptoactifs, en particulier dans le cadre de leur relocalisation ou implantation en Principauté. Il assiste également des institutions bancaires et financières dans ce domaine.